Shutter Island de Martin Scorsese (2009)

Publié le par BERENICE21

Paramount Pictures France

Il y a d’abord un tour de force scénaristique (à la manière de Sixième sens, de M. Night Shyamalan), qui amène le spectateur à se demander à partir de quel moment il a été abusé (à supposer, bien sûr, qu’il n’ait pas lu le livre de Dennis Lehane, dont le film est adapté). Et il se rend compte, avec un plaisir mêlé d’admiration, que l’on s’est joué de lui dès la première image, ou presque, lorsque Teddy Daniels-Leonardo DiCaprio et Chuck Aule-Mark Ruffalo abordent l’île, lorsqu’ils se voient obligés de remettre leurs armes aux policiers qui gardent l’hôpital, lorsqu’une internée accueille Teddy Daniels avec un signe de la main, qui est comme une reconnaissance… Et, dès le film achevé, on voudrait pouvoir le revoir, afin de repérer tous ces indices… Ce procédé, par la confusion qu’il crée dans l’esprit du spectateur dans sa perception de la réalité, permet en outre à ce dernier de s’identifier davantage au personnage interprété par Leonardo DiCaprio (excellent), plus antihéros que jamais.

Leonardo DiCaprio et Mark Ruffalo. Paramount Pictures France

A souligner également (du moins dans sa première partie) l’esthétique baroque du film (que ce soit les extérieurs ou les intérieurs), qui est comme le symbole du labyrinthe mental dans lequel est perdu Teddy Daniels. Une esthétique qui évoque un tableau d’Arnold Böcklin, peintre dont l’œuvre m’interroge autant que celle de Caspar David Friedrich (voir la critique de Lovely Bones) : L'île des morts, une toile représentant une île au coucher du soleil, vers laquelle se dirige une embarcation conduite par un homme drapé d’un linceul (Charon).

L’arrière-plan historique du film (le nazisme) renforce encore l’ambiance paranoïaque dans laquelle évoluent les personnages. Ce contexte est d’ailleurs pour moi plus important que la trame policière, laquelle n’existerait pas si Teddy Daniels n’avait pas connu l’expérience de la libération des camps de la mort.

Shutter Island constitue tout de même d’une œuvre à part dans la filmographie de Martin Scorsese, où l’on reconnaît moins son style (ici particulièrement sombre et désespéré). Peut-être est-ce dû au fait qu’il s’agit d’une adaptation, mais Scorsese se fait ici plus illustrateur que créateur. On peut aussi regretter un certain manque de rythme. Défaut qui s’évanouit évidemment lorsque l’on découvre le secret des protagonistes. Mais avant d’en arriver là, le cheminement est parfois un peu lent…

Leonardo DiCaprio et Michelle Williams. Paramount Pictures France



Publié dans Scorsese Martin

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