Ajami (vu le 9 avril 2010)

Publié le par BERENICE21

Ad Vitam

Ajami (du nom d’un quartier de Jaffa) est un film choc. Il se distingue d’abord par la collaboration inédite entre deux réalisateurs que tout -du moins dans nos esprits d’occidentaux conditionnés par une information souvent simpliste- devrait séparer : si tous deux sont Israéliens, l’un est Juif (Yaron Shani), l’autre est d’origine palestinienne (Scandar Copti).

Il saisit ensuite pas les thèmes qu’il aborde, thèmes certes classiques dès qu'est évoqué le contexte israélo-palestinien -fracture religieuse, affrontements claniques, rapport de soumission entre femmes et hommes…- mais illustrés ici sous un angle renouvelé (le film policier) et sans jamais tombé dans le manichéisme.

On ne sort pas non plus indemne de cette peinture presque documentaire de la banalité et de l’absurdité de la violence qui règne dans cette région : ainsi, cette discussion entre voisins au sujet d’un troupeau de moutons trop bruyant, commencée sur un ton aimable, et qui dégénère de la plus dramatique des manières.

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Sur la forme, Ajami est également un tour de force. En premier lieu grâce à la sophistication de son scénario, qui entrecroise différents destins (Omar, Israélien d’origine palestinienne, poursuivit par la vengeance d’une puissante tribu bédouine dont l’un des membres a été blessé par l’oncle du jeune homme ; Malek, un adolescent de Cisjordanie, désireux de trouver l’argent qui permettra à sa mère, gravement malade, d’être opérée ; Dando, un inspecteur de police juif, obsédé par l’idée de châtier ceux qui ont tué son jeune frère), aux parcours apparemment séparés, mais qui finalement se rejoindront dans un final tragique et imprévisible. Cette touche de film choral rappelle évidemment les scénarios de Guillermo Arriaga, l’auteur, entre autres, de 21 grammes et de Babel.

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La virtuosité de la mise scène concourt également à la réussite d’Ajami. La caméra, proche des comédiens (presque tous sont amateurs), capte au plus près de leur épiderme leurs émotions, leur fragilité, leur brutalité, leurs excès…

Je conclurai la critique de ce film (l’un de mes coup de cœur de cette année, avec Tétro), en citant le journal Le Monde : « Lorsqu’un film de genre parvient à intégrer aussi intelligemment dans ses gènes le contexte sociopolitique qui le sous-tend, cette œuvre a alors toutes chances d’être exceptionnelle ». Je ne peux pas mieux dire…



Publié dans Mes critiques - 2010

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