Never let me go (vu le 6 mars 2011)

Publié le par BERENICE21

Kathy (Carey Mulligan), Ruth (Keira Knightley) et Tommy (Andrew Garfield) sont depuis leur enfance pensionnaires à Hailsham, une école coupée du monde. Ils mènent là une existence idéale, où seuls comptent leur éducation et leur bien-être. Un monde dont le caractère idyllique s’effondre le jour où l’un des gardiens de l’institution (c’est ainsi que sont surnommés les enseignants), miss Lucy (Sally Hawkins), leur révèle leur véritable raison d’être : ils ne sont en fait que des clones destinés, une fois l’âge adulte atteint, à faire don de leurs organes à leur original…

Adaptation d’un roman de Kazuo Ishiguro, Never let me go est d’une brûlante actualité, puisque ce film sort sur les écrans moins d’un mois après la naissance en France du premier bébé-médicament -ou enfant du double espoir, comme le disent par euphémisme certains. Cette dystopie ne fait cependant qu’effleurer les questions éthiques soulevées par son sujet. De fait, elle ne s’interroge pas en profondeur sur la dimension morale de l’instrumentalisation de la vie humaine. Ni sur ses conséquences psychologiques. Mark Romanek préfère se concentrer -à l’image du livre ?- sur le triangle amoureux formé par Kathy, Ruth et Tommy : J’étais moins intéressé par le thème du clonage en lui-même que par le fait de m’en servir comme arrière-plan pour m’interroger sur ce qui est vraiment important, ce qui compte réellement dans une vie, explique le réalisateur dans le dossier de presse. L’histoire traite donc avant tout de l’amitié, de l’amour et de ce que vous choisissez de faire du temps qui vous est imparti. Cette approche assez inhabituelle pour un film de science-fiction donne à cette œuvre sa singulière et troublante beauté mélancolique.

Twentieth Century Fox France

Mais si Never let me go réussit si bien à nous émouvoir, c'est aussi -et surtout- parce que son auteur s'appuie sur des interprètes en état de grâce. Carey Mulligan, découverte l’année dernière dans Une éducation, livre ici une prestation d’une grande intensité. Tout comme Andrew Garfield (Deux sœurs pour un roi, The social network), dont la sensibilité à fleur de peau illumine chaque scène où il apparaît. On retiendra particulièrement celle où, se fondant sur les rumeurs qui agitaient l'imagination des élèves d’Hailsham, il vient apporter à Madame (Nathalie Richard) la preuve de son amour sincère pour Kathy, espérant ainsi obtenir un délai avant son dernier don. Keira Knightley m’a en revanche un peu moins touché. Peut-être est-ce dû à son personnage.

On regrettera tout de même la tentation esthétisante à laquelle succombe par instant Mark Romanek. Celui-ci se laisse en effet aller à quelques plans au romantisme un peu trop accentué (voir la course de Kathy et Tommy sur le ponton). Un manque de sobriété dû au fait qu'il vient du monde du clip vidéo et de la publicité ? Toujours est-il qu'en agissant ainsi, il semble ne pas faire entièrement confiance à la force de son histoire. Dommage...

Malgré cette réserve, Never let me go est un beau film porté par de grands comédiens en devenir, sur un sujet grave, même s'il n'est abordé qu'en arrière-plan. Il vaut donc que l'on s'y abandonne. Et ce d'autant plus que la soumission de ces jeunes gens à leur sort, suite à l'endoctrinement dont ils ont été l'objet, nous donne à réfléchir, par métaphore, sur notre propre inertie face aux discours des politiques et des médias...



Publié dans Mes critiques - 2011

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W
Content qu'il soit avec Norwegian Wood dans ton TOP bilan :)
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C
Je suis d'accord avec le fait que les "romances" prennent pas mal de temps et de place dans le film (je me demande pourquoi...le film avait beaucoup de force dans son sujet de toute manière), mais lorsque j'ai pensé au film a posteriori, ce n'est pas ce qui est resté...Je crois que malgré tout, ce qui est en toile de fond (la valeur de la vie humaine? le clonage? le don d'organes) prend le dessus...même si nombre de questions sont effleurées, mais non résolues.
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B
Oui, il est question d'éthique en filigranne et comme le dit squizzz, c'est d'autant plus fort, car mise a part l'enseignante au début, personne ne veut en parler tant c'est immorale, et le plus dur, c'est que personne ne se révolte, personne ne remet en cause l'atrocité du système d'abatage...
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G
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N
J'ai assez accroché avec cette proposition d'"anticipation du réel", et par les quelques idées qui germent dans le film. Mais je trouve comme toi un peu dommage que le thème principal soit noyé dans une histoire d'amour moins passionnante.
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